Ian Lancaster Fleming, né à Londres en 1908 et fils d’un membre du parti Conservateur du Parlement britannique
mort durant la Première Guerre mondiale, fut d’abord journaliste et correspondant de l’Agence Reuter avant
d’entrer dans le Service de Renseignement de la Marine (Naval Intelligence) en 1939. Il écrivit son premier
roman mettant en scène James Bond ( dont le nom est emprunté à celui d’un authentique ornithologue américain )
en 1953, «Casino Royale». Sa parfaite connaissance des Services Secrets de Sa Majesté lui a permis de donner
un cachet d’authenticité indéniable à ses ouvrages pleins de notations d’une exactitude rigoureuse comme le
code «007» contenant le double zéro qui désigne «un agent qui a tué et qui est autorisé à tuer en service
actif». Fleming écrivit en tout et pour tout douze romans de James Bond et un recueil de nouvelles. C’est
dire que les dix-huit films qui ont déjà été tirés de son oeuvre se sont contentés le plus souvent de ne
s’inspirer que très vaguement des intrigues...
D’emblée, les ouvrages connurent une vague de popularité
exceptionnelle; renforcée par une déclaration du président Kennedy au magazine «Life» en mars 1961 affirmant
que les romans de James Bond figuraient parmi ses livres de chevet. À la mort de l’auteur, survenue le
12 août 1964 ( à la fin du tournage de GOLDFINGER ) on estime que la vente de ses ouvrages, qui avoisinait
alors les trente millions d’exemplaires, lui avait déjà rapporté près de trois millions de dollars.
Et le succès ne s’est jamais démenti depuis, chacun de ses romans ( plus un certain nombre de récits
apocryphes ) étant constamment réédité et disponible en permanence sur le marché international.
Dès la parution de «Casino Royale», l’écrivain avait déjà reçu trois propositions d’adaptation
cinématographique. Aucune n’aboutit à l’époque. En 1954, le producteur Alexander Korda demanda à son tour
l’exclusivité d’un ouvrage qui n’était encore qu’à l’état de manuscrit. Puis Ian Fleming fut sollicité
pour la conception d’un court métrage qui devait être le film pilote d’une série diffusée par la télévision
britannique en 1957. Le personnage, à cette occasion, fut joué par le comédien Barry Nelson. Mais le projet
n’eut pas de suite.
Et ce n’est qu’en 1961 que l’Américain Albert R. Broccoli et le Canadien Harry Saltzman
emportèrent enfin le marché en achetant, pour une somme coquette, les droits d’adaptation de tous les romans
de James Bond, sauf «Casino Royale» acquis en 1953 par le producteur Charles K. Feldman. Saltzman et Broccoli
hésitèrent longtemps sur le comédien devant incarner le personnage. On avança les noms de Richard Burton,
Trevor Howard, Peter Finch et James Mason. Ian Fleming, de son côté, avait fait savoir que son choix se
portait sur David Niven. En fin de compte, les deux producteurs préférèrent donner sa chance à un inconnu
qui devait, par la suite accéder à une gloire enviée, Sean Connery - dont, toutefois, c’était déjà la dixième
apparition à l’écran. L’année de sa sortie, Dr. NO obtint la cinquième place au box-office anglais. Mais, à
partir du second film, tous les «James Bond» avec Sean Connery seront les «Top Money Makers» (les plus
grosses recettes) de l’année du cinéma britannique !
En 1967, Sean Connery, inquiet que le personnage ne
le cantonne dans un seul genre spécifique, décide d’abandonner la série qui lui a procuré gloire et fortune.
La même année, Charles K. Feldman profite de l’occasion pour sortir une adaptation de "Casino Royale", mais
qui tranche par sa tonalité de pastiche et son délire burlesque. Tandis que le cinéaste italien Alberto De
Martino, avec OPÉRATION FRÈRE CADET (Operation Kid Brother), tente de lancer un succédané de James Bond avec
en vedette Neill Connery, le propre frère de Sean. En 1969, Saltzman et Broccoli présentent une nouvelle
incarnation du super agent secret en la personne de l’Australien George Lazenby. Mais le film n’aura pas
le résultat escompté...
C’est grâce à l’insistance des deux producteurs et à une offre particulièrement
alléchante : un cachet d’un million de dollars alors que son premier contrat culminait à plus 15 000 livres !
Bien que Sean Connery reprendra du service pour un film, LES DIAMANTS SONT ÉTERNELS, en 1971. Ensuite,
le comédien déclarera ne plus vouloir personnifier James Bond. Il le fera pourtant douze ans plus tard
dans un «come back» tardif et titré malicieusement JAMAIS PLUS JAMAIS (Never Say Never Again : littéralement
«Ne dites jamais plus jamais !»), mais produit par une équipe concurrente de Saltzman / Broccoli.
Entre-temps, ceux-ci croient enfin avoir trouvé le digne successeur de Sean Connery en la personne de Roger
Moore, qui incarne pour la première fois l’agent secret anglais en 1973. Vedette de la télévision, Roger
Moore n’avait fait qu’une dizaine d’apparitions au cinéma depuis ses débuts en 1954. Il tiendra à son tour
le rôle dans sept films, autant que son prédécesseur, et, la lassitude et l’âge aidant, abandonnera le
personnage en 1985.
Toujours sur la brèche, Albert R. Broccoli et Harry Saltzman, qui veulent continuer coûte que coûte,
recherchent de nouveaux candidats. On cite les noms de Tom Selleck, de Mel Gibson, puis de Pierce Brosnan,
rejeté parce qu’il est la vedette d’une série de télévision fort populaire aux États-Unis, «Remington Steele»
(Roger Moore était pourtant une vedette de la télévision avec «Ivanhoé», «Le Saint» et «Amicalement Vôtre»,
lorsqu’il fut choisi en 1973). Le choix se fixe alors sur l’acteur anglais Timothy Dalton, qui fut donc la
cinquième incarnation du mythe le plus long et le plus prospère de toute l’histoire du cinéma pour deux épisodes
seulement (Tuer n'est pas jouer et permis de tuer). Ensuite, ce fut le tour à Pierce Brossnan de jouer ce rôle mythique, il intérpréta en effet "Goldeneye" en 95, puis
"Demain ne meurt jamais" en 97, et enfin "Le monde ne suffit pas en 99". Il est fort probable qu'il apparaisse encore
dans le prochain James...
Il est toutefois intéressant de noter que les comédiens les plus souvent apparus dans les films sont loin de
figurer parmi les plus célèbres. Ce sont respectivement Desmond Llewellyn qui incarne «Q», le pourvoyeur
d’armes spéciales et de gadgets délirants dans tous les films produits par Saltzman / Broccoli sauf Dr. NO;
Lois Maxwell (miss Moneypenny, la secrétaire de «M», le patron de James Bond), présente de Dr. NO à
TUER N’EST PAS JOUER; et Bernard Lee, qui a joué «M» inlassablement jusqu’à sa mort (il a été remplacé par
Robert Brown à partir de 1985). Il faut souligner que Bernard Lee et Lois Maxwell faisaient également partie
de la distribution de OPÉRATION FRÈRE CADET (1967).
Quant aux réalisateurs, ils sont demeurés relativement
fidèles à la série. Terence Young, son créateur, a dirigé trois des quatre premiers films. Ensuite,
Guy Hamilton et Lewis Gilbert ont signé alternativement les sept titres suivants de 1963 à 1979, les trois
premiers avec Sean Connery, les quatre autres avec Roger Moore, tandis que Peter Hunt dirigeait l’épisode
avec George Lazenby. Depuis 1981, John Glen, ancien monteur et assistant-réalisateur sur trois des films
précédents, a pris le relais.Nota : un autre roman écrit par Ian Fleming et destiné à la jeunesse, a fait
l’objet d’une adaptation cinématographique : CHITTY CHITTY BANG BANG (id, 1968), de Ken Hughes.Roland
Lacourbe